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« La végétation immobile donnait l’impression d’une masse spongieuse et habitée, d’un gigantesque ensemble de boursouflures et de replis dans lesquels se dissimulaient toutes sortes de monstres. De minuscule insectes qui s’infiltraient dans les poumons et grossissaient ensuite en aspirant le sang de leur victime. De larges prédateurs aux multiples mâchoires, rapides comme l’éclair. Un réservoir inépuisable d’hostilité. »
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La dernière arche
Auteur : Romain Benassaya
Illustration : Niko Henrichon
Maison d’édition : Critic / Pocket
Genre : Science-fiction
Nombre de pages : 617
Prix : 22 € (broché) / 10 € (poche)
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Synopsis
Dans la Mésopotamie des premiers âges, Shory, une jeune esclave, est vendue à un mystérieux individu nommé Atim, qui lui propose un marché : l’envoyer dans un fort, qu’elle devra protéger, en échange de sa liberté. Elle accepte et rejoint une étrange construction, entourée d’une forêt profonde. Elle y grandit, en compagnie d’autres rescapés, originaires de différentes périodes de l’histoire humaine. Tous ont rencontré Atim et se sont vu confier la mission de protéger le Fort. Ils se surnomment les Vigiles. Après onze années, Lena, une jeune femme originaire du XXIIème siècle, rejoint-elle aussi le Fort. Contrairement aux autres Vigiles, elle n’a pas rencontré Atim, et veut à tout prix rentrer chez elle. Shory décide de l’aider. Au-delà de la forêt qui assiège le Fort, elles découvriront les réponses à nombre de leurs questions : où sont-elles vraiment ? Pourquoi le Fort doit-il être protégé ? Et quelle est leur véritable mission ?

Dernier roman en date de Romain Benassaya,
La dernière arche se situe dans le même univers que son précédent roman
Pyramides, que j’avais beaucoup apprécié. Même si cela n’est pas mentionné sur le roman, je vous conseille vraiment de lire
Pyramides en premier, tout d’abord afin de savoir si le style de l’auteur vous convient (en sachant que
La dernière arche est un peu moins bon) et surtout parce que
La dernière arche se situe chronologiquement après et spoile certains évènements de
Pyramides. Néanmoins, vous n’aurez pas de problème à comprendre l’intrigue de
La dernière arche si vous n’avez pas lu le précédent.
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Le déploiement d’un worldbuilding
Le début de La dernière arche est assez déconcertant, car il ne commence pas comme un roman de science-fiction classique, mais il mélange plutôt plusieurs genres. C’est d’ailleurs particulièrement déroutant quand on a lu Pyramides avant. L’histoire démarre sur le sauvetage d’une enfant, Shory, vendue comme esclave dans l’Antiquité. Atim, l’homme étrange qui la recueille lui propose de partir pour un lieu inconnu, le Fort, qu’il faut protéger. C’est ainsi que Shory rejoint les Vigiles qui, comme elle, ont tous été sauvé par Atim. Le récit fait alors un bond temporel et on la retrouve onze ans plus tard alors qu’une nouvelle recrue vient d’arriver au Fort. Mais cette fois-ci la jeune femme ne semble pas avoir été envoyé au Fort par Atim et n’a qu’une idée en tête, retourner d’où elle vient.
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La dernière arche est séparée en plusieurs parties dans lesquelles l’auteur développe à chaque fois un worldbuilding différent. La première partie est la découverte du Fort, cet endroit étrange perdu au milieu d’une forêt extrêmement hostile peuplée de créatures menaçantes. Cette première partie est à la fois très intrigante et déroutante, car rien ne semble être cohérent. Les personnages qui peuplent le Fort proviennent tous d’époques différentes, toute leur vie est un mystère, on ne comprend pas leur rôle, l’endroit où ils sont, comment ils sont arrivés… Le récit semble être complètement incohérent et en même temps l’auteur a le don de nous faire voyager dans ses univers et de les rendre passionnants. Ainsi le worldbuilding est le véritable atout de ce roman, d’autant plus que ses proportions s’élargissent au fil du récit. Le début du roman fait plutôt penser à une histoire de survie en milieu hostile avec le développement d’un bestiaire particulier et de normes sociales adaptatives. Puis, les personnages vont quitter ce monde pour en découvrir un autre, à mille lieux de celui qu’il connaissait, où se sont surtout les complots politiques et un world building centré autour de l’architecture d’une ville futuriste qui sont développés. Ce deuxième univers m’a un peu fait penser aux mille et nuits, un monde qui semble féérique et magique, mais dans lequel se joue de nombreuses luttes de pouvoir et d’influence. Encore une fois, les apparences sont trompeuses, puisqu’après un énorme coup d’éclat Romain Benassaya balaye une nouvelle fois tous les repères connus pour repartir dans une toute nouvelle direction, cette fois-ci bien plus orientée science-fiction. Pour ceux qui ont lu Pyramides, c’est là que les pièces du puzzle commencent à se rassembler et que les grandes révélations arrivent permettant enfin de comprendre tout ce qui semblait incohérent au départ. Ainsi, c’est un immense worldbuilding que l’auteur déploie dans le roman et si cela vous donne une impression de fourre-tout à la lecture de la chronique, en réalité les choses s’intègrent bien dans l’histoire. L’auteur réussit à parfaitement recoller tous les morceaux de son intrigue sans que ça ne soit jamais difficile à suivre. La dernière arche est un roman rendu très accessible par la fluidité de la plume de l’auteur et du déroulé des évènements qui restent tout de même assez classiques. L’originalité réside surtout dans l’univers développé dont on mesure petit à petit l’immensité et par les retournements de situation très bien pensés.
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Les défauts de ses qualités
Si La dernière arche se distingue grâce à l’imagination fertile de l’auteur et son talent pour raconter les histoires, le roman possède également les défauts de ses qualités. Les différentes parties sont si différentes les unes des autres qu’elles nous font passer par toutes les émotions de l’émerveillement, à l’incompréhension et à l’ennui parfois quand les parties tirent un peu en longueur. De plus, si les retournements de situation sont excellents, il est difficile de croire en l’histoire avant les fameuses explications. Pas facile quand, comme moi, on a tendance à tout analyser de passer outre tous les éléments qui semblent incohérents. Il faut donc s’armer de patience et, bien heureusement, cela paye, car les révélations sont satisfaisantes.
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Mais, là où pêche sûrement le plus le roman sont les personnages. Si Romain Benassaya construit de très bons univers, il délaisse en contrepartie la psychologie de ses personnages. Et c’est d’ailleurs principalement pour ce point que je trouve ce roman moins réussi que Pyramides dans lequel les personnages m’avaient plus convaincue. Dans La dernière arche, les personnages restent globalement en surface, motivés par une cause principale (protéger le Fort, sauver sa famille, comprendre qui l’on est…) sans être vraiment animés par grand-chose d’autre, ce qui ne permet pas de leur apporter assez de nuances et de crédibilité. J’ai souvent été agacée par Shory, l’héroïne, dont je n’ai pas toujours trouvé les actes et les choix très logiques. Si La dernière arche est un bon divertissement, il aurait pu être excellent avec un personnage principal plus attachant et avec un peu d’âme.
La dernière arche est un roman de science-fiction très abordable grâce au talent de conteur de Romain Benassaya. L’auteur maîtrise parfaitement son récit pour en faire un véritable page-turner tout en construisant des intrigues divertissantes et des univers très développés. Le roman est particulièrement intéressant pour son worldbuilding dont on découvre petit à petit l’immensité, créant un sentiment d’émerveillement tout au long du récit. En contrepartie, l’auteur a mis moins de soin dans la construction et la crédibilité de ses personnages, ce qui occasionne parfois quelques longueurs et un peu d’agacement. Le roman demande également une certaine crédulité, car si certaines choses ne paraissent pas cohérentes, elles finissent bien heureusement par trouver des explications. Il faut donc être patient et cela en vaut la peine, car le roman propose de surprenants retournements de situation. Finalement La dernière arche reste un bon divertissement que je vous conseille si vous avez apprécié Pyramides !
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Je n’ai pas lu Pyramides mais j’avais noté ce titre suite à sa présence dans la sélection du PLIB de l’an dernier. Même si ton avis pointe quelques défauts, il donne envie. Je serais curieuse de lire ce titre surtout s’il est du style page-turner (ce n’est pas vraiment le cas de mes lectures du moment…)
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Oui si tu as envie de romans qui se lisent vite et facilement, Romain Benassaya est un très bon choix ! Pyramides était déjà un très bon page turner !
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Dommage pour les personnages, c’est important ! Je note de tester plutôt avec Pyramides pour voir si ça m’irait 🙂
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