
« Même si la pièce est vide, je n’ai pas l’impression d’être seule. Il y a peut-être même plus d’une personne. Quoi qu’il en soit, j’ai l’impression qu’on me regarde. C’est nul, je sais. Parce que, Dee, c’est moi, la chose dans la nuit. C’est ce que me disait toujours le Viking. Je suis la créature de la cave, le monstre sous le lit. Je ne dois pas avoir peur du noir. Je suis le noir. »

Autrice : Dawn Kurtagich
Traductrice : Hélène Mathis
Illustratrice : Marcela Bolivar
Éditeur : Le chat noir
Genre : Fantastique / Horreur
Date de parution : 1er avril 2020
Nombre de pages : 460
Prix : 19,90 €
Synopsis
Une vingtaine d’années s’est écoulée depuis que l’enfer s’est abattu sur le lycée Elmbridge, emportant la vie de trois élèves et laissant Carly Johnson portée disparue. La principale suspecte : Kaitlyn, « la fille de nulle part ».Le journal de Kaitlyn, découvert dans les ruines, révèle un esprit perturbé. Ses pages racontent une nouvelle version de l’histoire, bien plus sinistre et tragique, et la fille de nulle part se retrouve au centre de tout. Beaucoup disent qu’elle n’existe pas, et d’une certaine manière, c’est vrai – elle est l’alter ego de Carly Johnson.Carly est là le jour, laissant place à Kaitlyn la nuit. Et c’est durant la nuit que le mystère de la Maison Morte se dévoile, fruit d’une magie sombre et dangereuse.
Un roman atypique
The dead house est un roman atypique tant sur le fond que sur la forme. On y trouve tout d’abord un mélange de genres : thriller psychologique, horreur, peut-être du fantastique, chaque lecteur en jugera. Ainsi, le roman joue à la frontière des genres en présentant une héroïne possédant un trouble mental, le trouble de la personnalité multiple, mais avec quelques particularités uniques et le tout dans une ambiance horrifique. Le personnage principal possède ainsi deux personnalités : Carly qui vit le jour et Kaitlyn qui vit la nuit, chose surprenante puisque dans cette maladie, les personnalités interviennent généralement de manière spontanée et sans suivre un horaire aussi précis qu’ici. Autre point troublant, plus l’intrigue avance et plus les personnages semblent convaincus qu’il s’agit en réalité de deux âmes coincées dans un même corps. Alors réelle maladie mentale ou cause plus surnaturelle ? Le roman joue sur ces questions et laisse le lecteur se faire sa propre opinion.
Comme je le disais The dead house est également un roman atypique dans sa narration. Pas de narration linéaire, le récit prend la forme d’un rapport d’enquête qui fait suite à un accident ayant eu lieu dans le pensionnat où l’on suit les personnages. Le rapport composé de pages du journal intimes de Kaitlyn, de vidéos et d’interrogatoires revient sur les éléments s’étant produit les mois précédent l’accident jusqu’à la date fatidique. La majeure partie du récit se compose de pages du journal intime de Kaitlyn et à travers lui, c’est vraiment ce personnage que l’on va suivre à travers ses pensées les plus intimes. On va se retrouver dans la tête d’un esprit très perturbé qui se retrouve dans des situations qui vont l’amener à devenir de plus en plus instable.
Une intrigue qui joue sur le doute et le mystère
Il faut d’abord savoir que je m’intéresse beaucoup au trouble de la personnalité multiple, sujet sur lequel je me documente beaucoup. J’ai donc forcément été très enthousiaste par la thématique principale même si elle est traitée très différemment de ce dont j’ai l’habitude. En effet, l’intrigue s’éloigne un peu de la réalité pour prendre un ton plus fantastique même si l’autrice créé et entretient très bien le doute sur la question du fantastique, et ce, jusqu’aux dernières pages. Ainsi elle réussit à façonner une intrigue extrêmement mystérieuse, dans laquelle on n’est jamais vraiment sûr de ce qu’on est en train de le lire et sur les motivations des personnages. L’autrice a très bien travaillé ses personnages de manière à ce qu’ils soient difficiles à cerner et qu’on finisse forcément par douter d’eux à un moment ou un autre. Même le personnage de Kaitlyn est finalement difficile à cerner. Même si on lit ses pensées et qu’on croit donc la connaître, est-ce vraiment le cas ? Après tout, elle écrit dans son journal que ce qu’elle veut bien dire, et certaines pages sont manquantes… De plus, c’est un personnage si instable psychologiquement qu’elle pourrait être capable de tout.
Ainsi ce roman est particulièrement intéressant pour toute cette ambiguïté que nous offre l’autrice associée à une petite ambiance horrifique qui fonctionne très bien. Il faut dire que le cadre de l’intrigue alternant entre pensionnat poussiéreux, hôpital psychiatrique et la fameuse « dead house » incarne parfaitement bien les lieux typiques des histoires d’horreur. Rassurez-vous quand même, The Dead House ne devrait pas vous faire cauchemarder, l’ambiance horrifique restant en fond et contribuant surtout au côté glauque et dérangeant de l’intrigue.
Autre point que j’ai trouvé très réussit : la fin. Dawn Kurtagich a très bien maîtrisé son récit jusqu’aux dernière pages qui laissent le lecteur décider par lui-même ce qu’il veut comprendre de cette histoire. Finalement le récit est construit comme un true crime. Étant une grande amatrice de true crime, je suis souvent confrontée à des histoires qui n’ont pas de résolutions et dont on ne peut faire que des hypothèses. J’ai ressenti exactement la même chose avec The dead house : tous les éléments de l’enquête nous sont donnés, c’est au lecteur de croire à la thèse qu’il préfère et c’est peut-être finalement ce qui est le plus intéressant !
Une narration originale, mais génératrice de quelques défauts
Si la narration particulière du roman permet de maintenir du suspense et un flou autour des personnages tout au long de l’intrigue, il créé aussi quelques défauts. Tout d’abord, le fait de faire le compte-rendu de vidéos apporte quelques incohérences. Forcément, il y a des passages où ce qui est décrit dans la scène ne devrait tout simplement pas être visible puisque la caméra n’était pas là à ce moment précis ou cadrée autrement. Il est vrai que l’autrice a fait énormément attention à ce point, mais certaines incohérences sont quand même passées entre les mailles du filet. Finalement, cette narration n’a pas permis de m’immerger dans l’histoire et de croire aux évènements qui s’y déroulait. Je n’ai jamais vraiment cru à l’intrigue, car j’avais toujours une voix dans ma tête me disant que tout était trop lisse ou trop parfait pour être vrai. La caméra qui tourne absolument toujours même quand les personnages sont seuls, les pages du journal arrachées pile au bon endroit et dont certaines sont miraculeusement retrouvées et d’autres non, les personnages qui comme par hasard sont tous des experts dans une croyance censée être méconnue… Bref pas mal de points ont fait que même si l’histoire m’intéressait et que je passais un bon moment, je n’étais pas complètement immergée dans l’intrigue et ne me suis pas attachée aux personnages.
Conclusion
The Dead House est un roman très original de part son intrigue qui mélange les genres flirtant entre le thriller, le fantastique et l’horreur et sa narration sous forme de rapport de police. J’ai beaucoup apprécié le thème du trouble de la personnalité multiple et de la manière dont il est traité par l’autrice laissant toujours planer le doute entre maladie psychiatrique et surnaturel. L’ambiance légèrement horrifique et le suspense très bien mené jusqu’aux dernières pages rendent le roman très intéressant à lire. Malheureusement, du fait de la narration et de quelques facilités, j’ai eu du mal à vraiment croire à cette histoire et à m’attacher aux personnages. Cependant, j’ai passé un bon moment de lecture et ai particulièrement aimé la fin qui laisse le lecteur tirer sa propre conclusion de l’affaire !