
Quand ils étaient adolescents, dans la petite ville de Clegg, au Texas, Athena, Erin et Peter ont appris à maîtriser la Dissonance, une magie qui exploite les émotions négatives – isolement, colère, mal-être, jalousie… Hal, leur ami, s’est quant à lui découvert capable de se projeter dans un lieu a priori inaccessible : le Temple de la Douleur. Puis un drame les a séparés et les trois survivants se sont dispersés à travers le pays. Sans doute pour oublier, passer à autre chose. Vingt ans plus tard, prisonniers de vies banales, les voilà invités à retourner à Clegg pour clore le chapitre le plus douloureux de leur existence. La Dissonance leur permettra-t-elle d’éviter une nouvelle tragédie ou, au contraire, accélérera-t-elle l’inévitable ?

Après avoir adoré Une Cosmologie de monstres, j’avais une grande hâte de découvrir un nouveau roman de l’auteur et je me suis donc précipitée sur La Dissonance dès sa sortie. Si Une Cosmologie de monstres était plutôt un hommage à Lovecraft, le roman La Dissonance quant à lui se rapproche plus des écrits de Stephen King et on peut notamment y voir une inspiration moderne du roman Ça. On y suit une bande de quatre amis Athéna, Erin, Hal et Peter, qui vont découvrir, adolescents, qu’ils sont capables de comprendre et maîtriser une étrange forme de magie qui prend son essence dans la douleur et les émotions négatives. On les suivra en alternance adolescents ainsi que 23 ans plus tard dans leur vie d’adulte alors qu’un évènement va les rassembler à nouveau.
Entre adolescence et âge adulte, des liens forgés dans la douleur
La Dissonance est un roman d’aventure qui démarre tout de suite dans l’action. Le récit alterne le point de vue des différents personnages du groupe d’amis nous donnant une vision globale des évènements dans un style simple et entraînant. On ressent parfaitement l’ambiance de la petite ville américaine et le quotidien des adolescents est bien retranscrit. Les adolescents que l’on suit ne sont pas les plus populaires et n’ont pas une vie facile. Forcément pour pouvoir maîtriser la dissonance, il faut puiser dans la douleur, et ça, ces adolescents n’en manquent pas. On s’attache aisément à ces adolescents et le fait d’alterner entre les époques et de voir les adultes qu’ils sont devenus et les galères dans lesquelles ils se retrouvent accentuent cet attachement. Ces allers-retours passé/présent permettent d’entretenir un bon suspense puisqu’on s’interroge sur les évènements mystérieux qui ont pu créer un fossé entre eux. Un personnage est également absent du présent et il y a un mystère sur ce qui lui est arrivé.
La Dissonance est donc un roman efficace dans sa construction et dans son intrigue entraînante et immersive. Là où j’ai été moins convaincue est dans les relations qu’entretiennent les personnages. Si ce roman a pour volonté de mettre en avant l’amitié, il met en réalité énormément l’accent sur la romance avec plusieurs scènes intimes explicites. Tous les personnages flirtent avec tout le monde, il n’y a pas un personnage qui ne flirte pas avec un autre même en comptant les personnages secondaires et pas seulement lorsque les personnages sont adolescents. Les amateurs de romance y trouveront sans doute leur compte, mais pour moi, ces éléments prennent trop de place au détriment de l’intrigue. De plus, j’ai trouvé que certains sujets étaient traités avec beaucoup de maladresse comme les « problèmes » de poids d’un personnage qui ne servaient aucunement l’intrigue.
Un imaginaire débordant, mais déséquilibré
J’ai également eu du mal à croire en cette intrigue, car je n’ai pas été convaincue par la forme de magie qui y est développée. Lorsque notre bande d’adolescents va découvrir la dissonance, ils vont commencer à l’étudier avec l’aide d’un mentor, ils vont participer à congrès de dissonants, s’entraîner à la maîtriser. Il y a une volonté de leur part de comprendre ce qu’ils vivent, mais il nous manque les bases pour y croire. Shaun Hamill semble miser sur la suspension d’incrédulité du lecteur, mais cela ne suffit pas à compenser les incohérences ou le manque de fondations de son système magique. Pour moi, cette magie a mélangé trop de choses pour qu’on puisse y croire, le récit est un immense fourre-tout de moments étranges mélangeant plein de folklores différents : du zombie, des artefacts magiques, des ondines, un tulpa, un golem… J’ai eu parfois l’impression de lire une succession de scènes bizarres qui arrivaient comme un cheveu sur la soupe, car il m’a manqué les codes pour rassembler tout ça. Et puisque les personnages eux-mêmes s’interrogent sur la magie, j’avais aussi besoin de comprendre. Comment expliquer que cette magie, aussi rare soit-elle, touche précisément ces quatre amis ?! Quelle était la probabilité que ça arrive ? D’où vient cette magie, comment elle s’inscrit dans la société ? On n’en sait pas assez et j’ai trouvé ça trop facile de ne pas donner les codes afin de pouvoir inventer tout et n’importe quoi. Et le texte va pour moi trop loin dans l’accumulation d’éléments surnaturels.
La Dissonance, malgré ces défauts, est un roman avec beaucoup de potentiel qui reste un bon divertissement. Je n’ai eu aucun mal à aller au bout de ses 640 pages grâce à l’atmosphère immersive, au suspense, à l’intensité émotionnelle qui se dégage de certaines scènes et aux éléments surnaturels nombreux et variés, qui manquent parfois de cohérence mais apportent tout de même une part d’étrangeté inattendue. Ainsi, La Dissonance présente un univers foisonnant, certes désordonné, mais parfois également étonnamment original.
La Dissonance est un roman qui mêle efficacement aventure, émotions adolescentes et mystère, avec une construction narrative soignée et des personnages attachants. Pourtant, malgré son potentiel et son ambiance immersive, j’ai eu du mal à adhérer à l’univers magique développé, trop flou et surchargé à mon goût. Ceux qui apprécieront le mélange entre drame personnel, romance omniprésente et éléments fantastiques parfois excessifs y trouveront sans aucun doute leur compte. Pour ma part, j’en ressors partagée, j’ai été sensible à l’intention, mais frustrée par l’exécution.

Roman reçu en service de presse de la part des éditions Albin Michel Imaginaire que je remercie
D’autres avis : Outrelivres – Tachan

La Dissonance
Auteur : Shaun Hamill
Traduction : Benoît Domis
Couverture : Aurélien Police
Maison d’édition : Albin Michel
Genre : Fantastique
Publication française : 30 avril 2025
Nombre de pages : 640 pages
Prix : 24,90 € (broché) / 12,99 € (numérique)

Moins frustrée que toi j’ai apprécié cette lecture pour ce qu’elle était un simple divertissement jouant sur la nostalgie. J’aurais cependant aimer voir les références à King, mais ne l’ayant presque pas lu…
En tout cas, ça m’a donné très envie de lire la Cosmologie qui semble vous avoir plus convaincu les uns et les autres.
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J’ai hâte de voir ton avis sur Une cosmologie de monstres que je te conseille de lire pour Halloween d’ailleurs !
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VEndu !
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Ah dommage, j’aime beaucoup la Cosmologie. Bon, je vais patienter un peu avant d’éventuellement me lancer.
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J’ai aussi vu pas mal d’avis positif donc si les points abordés ne te dérangent pas, n’hésite pas à le découvrir quand même !
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