Sometimes a book

« J’arrêtai de lire – les mots commençaient à se brouiller devant mes yeux. Un nouveau morceau de mémoire, minuscule, se remettait en place.

Ceci n’était pas un parc d’attractions. Ni une sorte d’expérience sociale bizarre ni un jeu.
C’était une autre dimension.
Et elle m’appartenait. »

Après Tress de la mer Emeraude, les éditions Le Livre de poche continuent de publier les romans secrets de Brandon Sanderson. Comme le précédent, Manuel de survie du sorcier frugal dans l’Angleterre médiévale est très différent de ce qu’écrit habituellement l’auteur.  Comme Tress, ce nouveau roman possède un ton très léger et humoristique et surtout, cette fois-ci il ne fait pas partie du Cosmere, l’univers dans lequel se déroule la majorité de des romans de l’auteur. 

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, Manuel de survie du sorcier frugal dans l’Angleterre médiévale ne relève pas de la fantasy, mais est plutôt un roman de science-fiction. En effet, l’univers s’inscrit dans un futur plus ou moins éloigné (il n’y pas de repère temporel explicité) dans lequel les scientifiques ont découvert une multitude dimensions parallèles qui se sont plus ou moins éloignés de notre propre réalité. L’industrie s’est emparée de cette découverte et en fait commerce, envoyant les clients là où ils le souhaitent pour des vacances ou pour une nouvelle vie. Le récit débute lors de l’arrivée de John West dans un univers parallèle, sauf que tout ne se passe pas comme prévu, car le voyage l’a privé de ses souvenirs. Il ne sait plus qui il est, ni où il est, mais un pressentiment l’habite :  il doit absolument se cacher de certaines personnes de son passé… 

Brandon Sanderson s’empare donc du trope de l’amnésie pour construire son histoire, une forme romanesque qu’il avait toujours voulu essayer d’après ce qu’il révèle dans la postface du roman. Heureusement, l’auteur utilise plutôt bien ce trope, lui conférant une explication rationnelle en début de roman (même si elle reste légère) et évitant les trop grades facilités scénaristiques. Ce trope lui permet d’ailleurs d’exploiter une thématiques assez intéressante qui est le décalage entre la manière dont on se voit et ce que l’on est réellement. John, qui ne sait plus qui il est, s’imagine qu’il a fait des grandes choses, qu’il est une sorte de héros, avant de découvrir qu’il a en réalité une identité beaucoup moins glorieuse. La manière dont il se déconstruit en même temps qu’il récupère ses souvenirs est intéressante même si la thématique aurait pu être mieux traitée et plus approfondie. La manière dont les autres perçoivent John vient également la compléter et particulièrement les contemporains de la dimension dans laquelle il atterrit qui le prend pour un être surnaturel, identité avec laquelle il essaye de jouer avec beaucoup de maladresse. Les dialogues et les situations qui en découlent donnent ainsi un ton léger et humoristique qui rendent le roman très faciles à lire. Malheureusement, le ton ne convient pas vraiment, trop léger et burlesque ne permettant pas de s’impliquer réellement dans cette histoire. Comme pour Tress, on sent que Brandon Sanderson s’est amusé en l’écrivant et ne s’est pas pris au sérieux, mais on sent également qu’il a écrit le roman d’abord pour lui et pas pour les lecteurs. L’intrigue ne décolle réellement jamais, le tout reste assez banal et ennuyeux, et surtout il manque un grand nombre de repères pour pouvoir s’immerger correctement dans l’histoire.

Ainsi ce roman ne possède quasiment aucune description. Pourtant, il nous emmène dans une dimension parallèle et l’un des but premier pour le personnage principal est d’essayer de comprendre à quelle époque il est tombé puisqu’il n’a aucun souvenir. Comment réussir à visualiser les choses sans aucune description ? Personnellement je n’ai pas réussi à me projeter dans cet univers. Ajouté cela à une intrigue assez fade et à des personnages très caricaturaux, me fais ressortir très mitigée de cette lecture.

Malgré tout, pour terminer sur un point positif, Brandon Sanderson propose, comme souvent, un worldbuilding assez développé, pas concernant l’univers parallèle dans lequel John est tombé malheureusement, mais plutôt concernant le commerce de ces univers. Il y a ainsi de nombreuses pages avec des extraits de brochures ou du fameux manuel du sorcier frugal ponctuées d’illustrations très sympathiques qui parsèment le récit et qui m’ont finalement plus emballée que l’intrigue en elle-même !

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Malheureusement ce deuxième projet secret de Brandon Sanderson ne m’aura pas convaincue. Si j’ai aimé la création d’univers autour des dimensions parallèles et du commerce qui en est fait, je n’ai pas accroché à l’intrigue très légère dans son ton et dans son déroulé de manière générale. De plus, le manque de descriptions et les personnages caricaturaux n’aident pas à se projeter et à s’impliquer dans l’histoire. Manuel de survie du sorcier frugal dans l’Angleterre médiévale reste une lecture sympathique et facile à lire, mais est très loin du registre dans lequel j’apprécie cet auteur.