[Chronique] La vie invisible d’Addie Larue, de V.E. Schwab

Addie Larue
« Je ne suis pas un génie soumis à tes caprices déclare l’ombre en se décollant de l’arbre. Je ne suis pas non plus un vulgaire esprit de la forêt ravi d’accorder des faveurs en échange de babioles. Je suis plus fort que ton dieu et plus vieux que ton diable. Je suis la nuit privée d’étoiles, les racines sous la terre. Je suis à la fois promesse et potentiel. Quand il s’agit de jouer, c’est moi qui dicte les règles, choisi les pions et décide quand commencera la partie. Et, ce soir, je dis non. »


couv73895565La vie invisible d’Addie Larue
Autrice : V.E Schwab
Traduction : Pierre Szczeciner
Couverture :  José Julián Londoño Calle
Maison d’édition : Lumen
Genre : Fantastique
Date de publication française : 3 juin 2021
Nombre de pages : 701
Prix : 17,00 € (broché) / 9,99 € (numérique)
 
Synopsis 
Une vie dont personne ne se souviendra… Une histoire que vous ne pourrez plus jamais oublier… Une nuit de 1714, dans un moment de désespoir, une jeune femme avide de liberté scelle un pacte avec le diable. Mais si elle obtient le droit de vivre éternellement, en échange, personne ne pourra jamais plus se rappeler ni son nom ni son visage. La voilà condamnée à traverser les âges comme un fantôme, incapable de raconter son histoire, aussitôt effacée de la mémoire de tous ceux qui croisent sa route.
 
Ainsi commence une vie extraordinaire, faite de découvertes et d’aventures stupéfiantes, qui la mènent pendant plusieurs siècles de rencontres en rencontres, toujours éphémères, dans plusieurs pays d’Europe d’abord, puis dans le monde entier. Jusqu’au jour où elle pénètre dans une petite librairie à New York : et là, pour la première fois en trois cents ans, l’homme derrière le comptoir la reconnaît. Quelle peut donc bien être la raison de ce miracle ? Est-ce un piège ou un incroyable coup de chance ?
MON avis
V.E Schwab propose avec La vie invisible d’Addie Larue un roman assez différent des univers et des ambiances qu’elle explore habituellement. Revisitant le mythe de Faust, ce fameux héros qui avait vendu son âme au diable, La vie invisible d’Addie Larue est un roman intimiste évoquant l’oubli, la peur de la mort et de ne pas être aimé.
 
Dans ce roman, on suit Addie, une jeune femme née à la fin du XVIIe siècle et coincée dans une vie sans saveur ni promesse. Alors que son destin semble tout tracé, mariage forcé, enfants, foyer, elle passe un pacte avec une entité démoniaque qu’elle nomme Luc et qui lui offre l’immortalité. En contrepartie, personne ne sera plus capable de se souvenir d’elle. Addie commence alors une vie solitaire, naviguant au gré des siècles comme un fantôme qui ne peut laisser aucune trace sur son passage. Jusqu’au jour où elle rencontre Henry, un homme capable de se souvenir d’elle.
 
L’intrigue navigue entre le présent et le passé remontant l’histoire d’Addie depuis son enfance. Le présent se déroule à New York en 2014. On y découvre une Addie au quotidien bien rodé qui n’a plus de mal à trouver de la nourriture ou un toit où dormir. Si son quotidien est plus simple, il y ressort tout de même une grande mélancolie, Addie essayant de construire des relations avec des personnes qui l’oublie dès qu’elle passe le pas de la porte et répétant donc jour après jour les mêmes gestes, les mêmes conversations… Les chapitres du passé débutent en 1698 alors qu’Adeline a 6 ans. On découvre son quotidien très simple et sa relation avec Estelle, une femme de son village qui prie d’anciens dieux et a appris à Addie à ne jamais convoquer les dieux qui ne répondent que la nuit. Et pourtant c’est ce qu’Addie finira par bien faire. S’en suivent des cheminements incertains qui mènent Addie jusqu’à Paris où elle va apprendre à voler et à survivre. Les chapitres du passé se concentrent alors sur les rencontres entre Addie et Luc et la relation ambigüe qu’ils construisent au fil des années.
 
La vie invisible d’Addie Larue est un roman calme et contemplatif. Il joue sur l’atmosphère plutôt que l’action dégageant une volonté de construire une ambiance sombre et mélancolique. Malheureusement, V.E. Schwab ne réussit pas à construire une atmosphère assez solide pour rendre le récit envoutant. Le manque d’action n’est pas dérangeant, car cela construit l’ambiance vaporeuse du roman, mais celle-ci n’est pas assez prononcée pour tenir sur la longueur. Ainsi le style ne convient pas, V.E Schwab essaye d’adopter une écriture poétique et s’il y a quelques envolées lyriques, cela n’est pas conservé sur la durée et l’écriture n’est ainsi pas assez puissante pour l’histoire qui est racontée. Peut-être que le problème vient de la traduction et du fait que ce livre soit traduit dans une maison d’édition young adult alors qu’il veut raconter une histoire adulte. Il n’empêche que les dialogues et le style semblent allégés pour pouvoir être lus par de plus jeunes lecteurs au détriment de l’ambiance et des métaphores qui sonnent souvent creux. 
 
Si La vie invisible d’Addie Larue reste un bon divertissement qui se lit très rapidement et facilement malgré la langueur qui s’y dégage, l’intrigue souffre d’une trop grande linéarité et d’un manque de surprise. Tout au long de la lecture, on ressent un sentiment d’attente, comme si le récit ne démarrait jamais vraiment, mais qu’il avançait vers un élément déclencheur qui finalement n’arrive jamais. On attend donc une révélation ou simplement une profondeur dans les thématiques, mais si certaines révélations arrivent elles sont très attendues. Aucune surprise donc que ce soit dans l’intrigue que dans les twists de fin qui ne font pas l’effet wahou escompté. De plus, si le roman aborde des thématiques pertinentes que j’évoquais au niveau à savoir l’oubli, la peur de la mort et de ne pas être aimé, elles sont plus mentionnées au détour des plaintes des personnages que réellement développées. Plus, le temps passe et plus il me reste un sentiment de vide et de légèreté en repensant à cette lecture. Tout m’a semblé être effleuré de beaucoup trop loin pour être vraiment percutant et en faire une lecture marquante. Finalement, c’est le genre de roman qui nous fait passer un bon moment de lecture, mais dont les défauts ressortent après la lecture, lorsqu’on prend du recul. 
 
La deuxième moitié du roman est quasiment entièrement consacré à la romance et, même si ce n’est pas ce que je préfère, l’autrice prend le temps de la développer et ne tombe pas dans les clichés du genre. Cependant, j’ai trouvé qu’aucune alchimie ne s’installait entre les deux personnages et je n’ai pas réussi à croire en leur histoire. Une relation s’installe également entre Luc et Addie qui est plus intéressante et apporte un peu de piquant à l’intrigue. Pas de quoi vraiment sauver le reste. 
 
J’ai donc été plutôt déçue de cette lecture. Adorant les romans d’ambiance sombre et mélancolique, je n’y ai pourtant pas trouvé ce que je recherchais du fait d’un ton pas assez assumé et travaillé pour construire une réelle atmosphère. Le roman se lit pourtant facilement, un léger suspense s’installe donnant envie de lire la suite qui finalement reste linéaire et sans grande surprise. Ce n’est donc pas une lecture désagréable, mais qui laisse un goût d’inachevé devant un potentiel inexploité. 
 
avis mitigé

Une réflexion sur “[Chronique] La vie invisible d’Addie Larue, de V.E. Schwab

  1. Marion 14 août 2023 / 12 h 27 min

    La couverture de l’édition est vraiment magnifique mais je ne pense pas que ce genre de lecture me conviendrait… Merci pour cette chronique intéressante 🙂

    J’aime

Laisser un commentaire